Médiathèque municipale Till-l’Espiègle à Villeneuve-d'Ascq

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Label Architecture Contemporaine RemarquableLabel Architecture Contemporaine Remarquable

Adresse renseignée dans la base Mérimée :
96 chaussée de l'Hôtel de Ville
59493 Villeneuve-d'Asq - France

Code Insee de la commune : 59009
Nord [59] - Lille - Nord Pas de Calais (Hauts-de-France)

Adresse approximative issue des coordonnées GPS (latitude et longitude) :
5 Rue Jean Vilar 59650 Villeneuve-d'Ascq

Description :
Comme toutes les villes nouvelles, Villeneuve-d’Ascq fait figure de laboratoire d’architecture, où s’expérimentent des réalisations aussi diverses que la CARSAT de Serge Mesnil et Jacques Delrue (1980), édifice monumental aux bâtiments modulaires multiples situé dans le sud-ouest de l’agglomération, ou le LAM de Roland Simounet et son étagement de boîtes habillées de brique rouge. Le quartier de l’Hôtel-de-ville, où est élevée la médiathèque Till-l’Espiègle, n’est pas le premier à sortir de terre. Il succède par exemple à ses voisins immédiats situés, respectivement, à l’est et au nord de ses limites : le Triolo et le Pont-de-Bois (quartier de l’université) commencés en 1971. Le programme général d’aménagement du quartier prévoit l’implantation de la médiathèque sur une parcelle d’une superficie de près de 4 500 m2, qu’elle partage en deux parts presque égales avec le théâtre la Rose-des-Vents (côté est). Le dossier de demande de permis de construire y projette la réalisation de 2 200 m2 d’espaces, dont 1 800 accessibles au public. En conséquence, une partie de la médiathèque doit s’adosser à la haute façade ouest, en béton banché et enduit, du théâtre, dont le foyer est inclus dans le projet. Cela induit bien plus qu’une servitude de mitoyenneté : le voisinage du théâtre implique en effet de penser le programme de la médiathèque en fonction de celui-ci. C’est ainsi que dans une note de présentation portant sur les possibilités d’extension de la médiathèque (produite avant 1980), le foyer du théâtre est mentionné comme un élément qui « [permettrait] de rappeler à tous la communion de ces deux lieux de culture ». Concrètement, une verrière est prévue et réalisée dans la partie adossée au bloc ouest que forme la Rose-des-Vents, dans l’optique de « laisser intacte la présence du théâtre ». Véritable élément d’articulation, le foyer en question est donc conçu comme un élément de la distribution dont la fonction peut changer au gré des usages (pouvant servir de promenoir, de lieu d’exposition ou de lecture ou bien encore d’extension de la salle polyvalente de la médiathèque). Outre cette articulation avec le théâtre mitoyen, le programme prescrit deux autres principes, également liés à son insertion urbaine et paysagère : l’accent doit être mis sur son orientation vers le Forum-Vert et sur son intégration dans les cheminements piétons existants. Bordée à l’est par le boulevard Van-Gogh, grande artère conduisant notamment vers la cité scientifique au sud-est de l’agglomération, la médiathèque est placée à la jonction entre deux pôles opposés. Depuis le boulevard, des volées de marches permettent d’y accéder via une passerelle qui, surplombant la voirie, mène à la chaussée de l’Hôtel-de-Ville. Entre ce côté oriental du bâtiment et le côté ouest, dominé par le Forum-Vert tout juste réalisé, se forme un véritable contraste entre ville et jardin. Or, la thématique paysagère est omniprésente dans le projet. La forme générale de l’édifice, dont le gabarit ne doit pas dépasser la hauteur maximale du théâtre, est indéfinissable en un seul mot. Sa composition très éclatée lui permet de se fondre dans l’écrin de verdure que forme le Forum-Vert. La médiathèque se découvre depuis son accès public unique, situé au niveau « dalle », en y pénétrant par le 96 de la chaussée de l’Hôtel-de-Ville. La zone qui se trouve être de plain-pied avec la dalle se résume au hall d’entrée et à son espace d’accueil. Ceux-ci conduisent vers un palier – doté d’une fenêtre intérieure donnant sur la grande salle de prêt adultes – au sud, de part et d’autre duquel des volées de marches descendent (à droite) vers le niveau « jardin » et montent (sur la gauche) vers le niveau dit « dalle » dans les plans, mais qui en réalité se situe à l’aplomb du reste à hauteur d’un demi-niveau. Cet étage public, le plus haut, également accessible par la mezzanine de la salle de prêt, comporte une « salle d’exposition » ouverte, plutôt conçue comme un grand palier donnant accès à une salle polyvalente. Ici, une petite volée d’escaliers conduit vers la salle des périodiques située, de façon isolée, à l’extrémité orientale au nord de la composition : ancien foyer du théâtre de la Rose-des-Vents mentionnée dans le projet à titre d’extension, elle n’est aménagée de façon permanente qu’en 2010-2011 et n’appartient donc pas au programme initial. Avec ses grandes surfaces vitrées, dotées de menuiseries en aluminium laqué de couleur bleue, le bâtiment a pu être comparé à une « cascade de verre ». Portées par des murs en brique de couleur « surschiste flammé », les verrières évoquent également des serres d’horticulture, dont la légèreté apparente contraste avec le volume de béton de la grande salle de la Rose-des-Vents. À l’intérieur, une forêt de piliers habillés de briques assortie d’un réseau d’escaliers – un principal, de nombreux autres secondaires – structurent et harmonisent les espaces ; il résulte de cette composition et de ce choix de matériau, un esprit d’unité dans la diversité. Enfin, point remarquable de la réalisation, la multiplicité des niveaux aménagés dans cet édifice complexe et ludique agrippé aux reliefs du terrain naturel et de la dalle, induit la contrainte de l’éclairement naturel. Dès l’élaboration des premiers projets, les maîtres d’œuvre réfléchissent aux moyens de pallier à son insuffisance potentielle par la mise en place d’un éclairage artificiel placé en des lieux stratégiques de ce labyrinthe où la verdure, en s’invitant comme troisième matériau dominant, est amenée à créer des zones d’ombre. L’aménagement de cinq étages (niveau 1 : sous-sol ; niveau 2 : Forum-Vert ; niveau 3 : dalle, chaussée de l’Hôtel-de-Ville ; niveau 4 : logement de fonction et enfin niveau 5 : chaufferie et machines), complétés par des demi-niveaux, est en partie responsable du dessin complexe qui caractérise la médiathèque Till-l’Espiègle. L’édifice se présente comme une accumulation de volumes, par juxtaposition et superposition. De la même manière, le bâtiment se caractérise par la multiplicité de ses modes de couvrement et leurs matériaux, répartis en trois catégories selon leurs propriétés respectives : opacité, translucidité ou transparence (selon les zones couvertes). Les couvertures opaques se concentrent principalement sur les pièces et salles réservées au service. Les verrières transparentes offrent quant à elles des vues, surplombantes ou non selon que le visiteur se trouve dans le jardin ou sur la chaussée piétonnière, sur l’intérieur des salles. Ces points de vue extérieurs sur l’intérieur permettent aussi d’embrasser d’un regard la complexité du lieu dont l’exploration intérieure est toutefois rendue très simple par la logique de ses cheminements, appuyés par une signalétique claire. Pour le lecteur, la visite se résume aux étages du jardin (niveau 2) et de la dalle (niveau 3), excluant le sous-sol (niveau 1), principalement composé de bureaux et de locaux de service. Le niveau du Forum-Vert, desservi par trois portes d’accès, regroupe le plus grand nombre de salles réparties de part et d’autre de l’entrée du personnel pratiquée côté ouest (visible depuis le fond du jardin). Ateliers et bureaux (dont celui de la direction) occupent la partie nord de ce rez-de-jardin, d’où un escalier de service conduit vers le sous-sol. Plus à l’est, se trouvent l’ancienne discothèque (aujourd’hui aménagée en salle de consultation adultes) et son extension et, côté sud, la vaste salle de livres de prêt à destination des enfants. Celle-ci forme un retour vers la verrière du jardin, en encadrant la « boîte » réservée à l’heure du conte, également ouverte sur le Forum-Vert par une surface vitrée. La salle de prêt, accessible via un premier palier depuis l’escalier principal, est impressionnante : avec ses verrières placées côté chaussée et contre le théâtre, ses huit piliers en brique rouge, la mezzanine qui la surplombe et la vue qu’elle offre sur la serre aménagée sur sa partie orientale du sous-sol, elle offre un exemple remarquable d’aménagement ouvert et lumineux. Conçue pour être visible de la rue, elle peut également être observée depuis le palier correspondant au hall d’accueil du demi-niveau supérieur (le niveau « dalle »), à travers un encadrement équipé d’un vitrage en verre à armature métallique (de type Dravel). En pendant de la salle de prêt adulte, côté nord, l’actuelle discothèque (ancienne « consultation ») offre un espace plus intimiste malgré la présence, là encore, d’une verrière qui la rend visible depuis la chaussée. Dans l’angle nord-ouest de la pièce, un petit escalier ouvert forme une issue de secours tout en ajoutant de l’agrément à l’endroit.

Historique :
Construite entre 1970 et 1983 dans le cadre de la mise en place de nouvelles politiques nationales d’aménagement du territoire et de maîtrise de la croissance urbaine, Villeneuve-d’Ascq est une des neuf « villes nouvelles » créées depuis la fin des années 1960 en France. Motivée entre autres par la nécessité de faire face à une nette croissance de la population depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale (dans le Nord-Pas-de-Calais, cette croissance est même supérieure à la moyenne nationale), la création de cette nouvelle génération d’espaces urbains doit permettre de pallier à l’insuffisance et à la vétusté des logements en des points stratégiques du territoire. Plus que d’apporter des réponses épisodiques à des besoins ponctuels, il s’agit de répondre au défi démographique et territorial en portant sur ses multiples enjeux un regard global et pluridisciplinaire et ce, dans un réel souci de planification. C’est ce qu’introduit succinctement mais avec aplomb la formule : « construire des logements ne suffit plus : il faut construire des villes » (cité dans : Ville nouvelle, ville plurielle, p. 14). Dans cette optique, cinq villes nouvelles voient le jour en région parisienne et quatre en province – dont Villeneuve-d’Ascq. La création de Villeneuve-d’Ascq suit plusieurs étapes. À partir de la fin des années 1960, la prise en compte de l’est lillois dans le cadre du schéma d’aménagement régional élaboré par Gérard Deldique en 1965 – consécutivement à la crise industrielle et sociale touchant le bassin textile et minier du Nord-Pas-de-Calais – constitue l’une des grandes phases de cette genèse. L’axe métropolitain imaginé par l’architecte-urbaniste ouvre la voie au projet résumé par la formule « donner une ville à l’université » : il s’agit d’englober la cité scientifique, déjà en partie construite à la fin des années 1950 dans le sud-ouest de l’actuelle agglomération villeneuvoise, dans un projet urbain comprenant logements et équipements. Le 6 février 1967, année de la création des directions départementales de l’équipement (dont le directeur, pour le département du Nord, est Edgard Pisani), un comité interministériel pour l’aménagement du territoire met en route le projet Lille-Est. Nouvelle étape dans la création de la ville nouvelle, les trois communes d’Ascq, Flers et Annappes fusionnent le 25 février 1970. Des années plus tard, la construction de l’ensemble littéraire et juridique (université Lille 3, 1971-1974) du Pont-de-Bois imaginé par Pierre Vago et André Lys complète la partie scientifique de ce vaste chantier urbain. A la suite de vives tensions avec les habitants des communes fusionnées, provoquées par la faiblesse du premier cadre juridique du projet, un décret du Conseil d’Etat promulgué le 11 avril 1969 crée l’Etablissement public d’aménagement de Lille-Est (EPALE). Financé par la communauté urbaine de Lille (CUDL, créée en décembre 1967) et par le département du Nord, cet établissement public spécialement chargé de l’aménagement de Lille-Est doit assurer la coordination des actions de tous les responsables de l’aménagement urbain (achats de terrains, planification, maîtrise d’ouvrage, etc.). Quartier par quartier et secteur par secteur, la maîtrise d’œuvre des divers projets de construction d’édifices et équipements est confiée à des équipes pluridisciplinaires (composées non seulement d’architectes et d’urbanistes, mais également d’ingénieurs, de juristes, économistes et sociologues, etc.). L’EPALE en assure la maîtrise d’ouvrage, garantissant l’équilibre typologique des réalisations qui jalonnent le développement urbain de Villeneuve-d’Ascq. De l’immeuble de logement au stade, en passant par les équipements scolaires ou culturels, les ensembles universitaires ou les églises, de nombreux édifices sont construits entre 1970 et 1983. Le projet de construction de la médiathèque Till-l’Espiègle, voit le jour à la fin de la période. Villeneuve-d’Ascq adopte le langage propre aux villes nouvelles : séparation des différents types de flux de circulation, urbanisme sur dalle ou volonté de créer de l’animation autour de projets d’espaces publics. Son développement en une « fédération de quartiers » lui donne cependant un caractère labyrinthique et organique, inattendu dans un type d’urbanisme fréquemment considéré, à tort, comme ultra rationnel. Comme toutes les villes nouvelles mais de façon sans doute plus prononcée, Villeneuve-d’Ascq se distingue en outre par la faiblesse – relative – de sa densité moyenne et par l’étendue importante de ses espaces verts. Figurant au nombre des aménagements paysagers et végétalisés de la ville, le Forum-Vert créé en 1978 par l’architecte P. Canivez constitue un des points forts du secteur du quartier de l’Hôtel-de-ville, dont il constitue le poumon vert tout en formant un arrière-plan végétal aux bâtiments environnants dont l’hôtel de ville (Philippe Lepère, 1976), le théâtre La Rose-des-Vents (Bernard Bougeault, 1976 et extension par G. Zeller, 1989) et la médiathèque Till-l’Espiègle. Celle-ci, avec le théâtre sur lequel elle s’adosse, s’inscrit dans une programmation plus large visant à faire fleurir, dans cette seconde période d’aménagement, une offre culturelle solide. Elle comprend notamment la création du musée d’art moderne (le LAM) de Roland Simounet, inauguré en 1978 (quartier Héron). Elle est complétée plus d’une décennie plus tard, par le Forum des sciences (Jean-Claude Burdèse, 1996). Les architectes de la médiathèque, Martine et Philippe Deslandes, signent également à Villeneuve-d’Ascq trois édifices scolaires : l’école Frédéric-Chopin (1977), le collège du Triolo (1978) et le groupe scolaire Paul-Verlaine (1981). Rompus à l’élaboration d’équipements dans des villes nouvelles (Cergy-Pontoise, Saint-Quentin-en-Yvelines), ils sont retenus au terme du concours pour la construction d’une médiathèque, lancé en juillet 1979, par la commission des marchés de l’EPALE – maître d’ouvrage délégué en vertu de la convention du 28 avril 1978. Complétée par le bibliothécaire M. Mayeur, la maîtrise d’ouvrage se réunit régulièrement, notamment à la Direction du livre, pour établir les points importants et régler les détails du programme, dont les enjeux dépassent le strict cadre culturel. La demande de permis de construire, formulée en février 1980, se concrétise par la délivrance de l’arrêté autorisant les travaux, le 26 juin 1980. Suite au concours organisé en 1984 pour la réalisation du 1 % artistique, Dominic Grisor réalise l’œuvre intitulée « Signes majeurs », installation in situ en bois peint (aujourd’hui démontée), conçue en applique et dont les symboles cunéiformes rappellent la première forme d’écriture codée sans illustration. La médiathèque ouvre au public en 1984 sous le nom de Till-l’Espiègle (personnage de fiction connu pour ses facéties), tandis que le chantier se termine officiellement en 1985. Considérée comme une réussite architecturale et un équipement novateur « excluant ostentation et monumentalité » au profit de l’ouverture, la médiathèque vaut à ses architectes le prix « métal terre et création », décerné par l’Institut français de l’architecture en 1989.

Architecte ou maître d'oeuvre :
Deslandes Philippe (architecte), Deslandes Martine (architecte)

Datation de l'édifice :
1970, 1983

Année d'obtention du label Architecture Contemporaine Remarquable :
2023

Fiche Mérimée : ACR0001807

Dernière mise à jour de la fiche Monumentum : 2025-01-09

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