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Adresse renseignée dans la base Mérimée :
7B avenue de Montrapon
25000 Besançon - France
Code Insee de la commune : 25056
Doubs [25] - Besançon - Franche Comté - Bourgogne-Franche-Comté
Adresse approximative issue des coordonnées GPS (latitude et longitude) :
16 Place de Montrapon 25000 Besançon
Eléments protégés :
Usine, y compris le décor intérieur et le jardin (cad. HX 58) : inscription par arrêté du 20 juin 1986
Description :
Le site comprend du nord au sud les trois bâtiments principaux, la terrasse en terre-plein et son mur de soutènement, la piscine puis le court de tennis. Les bâtiments ont des murs en béton armé, structurés suivant un système poteaux-poutres laissé apparent et habillé de panneaux préfabriqués en béton de gravillons (de l'Ognon) lavé, et sont coiffés d'une terrasse également en béton armé, masquée par une corniche en forte saillie.Légèrement en retrait de l'avenue de Montrapon, l'usine (31,40 x 17,65 m) est perpendiculaire à elle. Sa façade antérieure correspond donc à un mur de croupe étroit que la cage d'escalier, en retour au nord-ouest, permet d'élargir pour présenter trois travées aveugles, exception faite de la porte d'entrée (surmontée de l'inscription Montres Dodane). Ne comptant que deux travées, la façade postérieure est peu percée, l'ouverture principale étant la porte-fenêtre du salon au rez-de-chaussée dont le cadre forme une forte saillie. La façade latérale droite (à l'est) est largement ouverte au rez-de-chaussée et au premier étage par deux portes-fenêtres par travée, séparées par un trumeau et montant jusqu'au plafond ; le deuxième étage est percé de deux fenêtres à l'italienne carrées accolées. Le même parti est retenu pour la façade latérale gauche mais avec des fenêtres au rez-de-chaussée ; la travée de l'escalier n'est par ailleurs percée que de deux petites fenêtres carrées par travée, disposées en partie haute de chaque niveau. Les façades sont surmontées d'une imposante corniche en saillie.Avec sa cage d'escalier hors-oeuvre, l'usine a un plan en L et compte cinq niveaux : un sous-sol sur cinq travées au nord-ouest (caves, chaufferie), un étage de soubassement (buanderie, vestiaire, archives et conciergerie), un rez-de-chaussée surélevé (appartement), un premier étage (accueil et bureaux, séparés par des cloisons), un second étage (atelier de fabrication). Ces niveaux sont desservis par l'escalier principal, tournant à retours avec jour, en béton revêtu de marbre de Comblanchien ; l'appartement dispose également d'un escalier extérieur tournant en béton, accessible depuis une terrasse (portée par des poteaux) sur laquelle ouvrent le salon et le séjour. Les quatre niveaux supérieurs sont chacun formés de deux nefs délimitées par trois rangées longitudinales de poteaux ayant 5,67 m d'entraxe. Ces poteaux sont carrés au soubassement et au rez-de-chaussée, polygonaux au-dessus (colonnes). Ils délimitent pour les murs gouttereaux une trame répétitive de sept travées, de deux fenêtres et 4,40 m de largeur chacune. Les parois sont constituées à l'extérieur des encadrements de baies en béton armé et des panneaux préfabriqués (de 7,5 cm d'épaisseur), d'un vide d'air de 5 cm puis d'une paroi de briques creuses de 17,5 cm. La présence de l'atelier de fabrication a conduit à soigner l'isolation pour se protéger du bruit, des écarts de températures et des vibrations (nature des murs et baies à double-virage) ainsi que de la circulation des poussières (prise d'air à chaque étage et évacuation par des cheminées). A l'origine, les sols sont revêtus de panneaux de fibres de bois (isorel) durs collés sur la dalle et formant une marqueterie, les murs et les plafonds d'isorel mou peint en blanc (certaines pièces ont des boiseries en chêne).Les deux bâtiments annexes à l'ouest (anciens garages) reprennent le même parti constructif. Ils sont en rez-de-chaussée, celui dans l'angle comportant un sous-sol.Le jardin est formé de parterres de gazon occupant la terrasse en terre-plein, qui s'achève par un mur de soutènement en briques portant une balustrade et laissant passage à trois escaliers indépendant droits. Ces derniers conduisent au niveau inférieur occupé par la piscine (profonde d'un mètre seulement) puis au cours de tennis (recouvert de graviers).
Historique :
Cest en 1939 que lhorloger Raymond Dodane confie à Auguste Perret la construction dune usine de montres. Achevée en 1943, elle réunit dans un seul bâtiment à plan en L, fonctions de production, fonctions administratives et logement patronal. Larchitecte met en oeuvre dans ce bâtiment à quatre niveaux le système de construction poteaux-poutres en béton armé et apporte un soin particulier aux nuisances générées par le travail (bruit, vibration, poussières). Outre le jardin privé comprenant piscine et court de tennis, Perret a également dessiné les éléments de décor intérieur. Désaffectée depuis sa fermeture en 1994, lusine Dodane demeure, par sa grande homogénéité architecturale, un témoignage essentiel de lactivité horlogère bisontine.
L'usine est bâtie de 1939 à 1943 pour l'industriel Raymond Dodane (1905-1984), vice-président à partir de 1938 puis président de la Fabrique d'Horlogerie de Besançon (fondée en 1793), et président à partir de 1948 de la Fédération nationale de l'Industrie française de la Montre.Représentant la troisième génération d'une famille d'horlogers, ce dernier est le fils de Gabriel Alphonse Dodane (1878-1959), fabricant d'horlogerie venu au tout début du XXe siècle à Morteau (36 rue de l'Helvétie) avec son père Alphonse (1839-1906) pour, suivant la tradition familiale, "tirer parti de l'électricité et du chemin de fer". A l'origine de la vocation horlogère de la famille, Alphonse était fabricant de roues de cylindre à Fournet-Blancheroche, où il travaillait avec son beau-père François Xavier Joubert dans l'usine créée par ce dernier à la Rasse en 1857 puis, dans un second temps, s'était établi à son compte dans une ferme du Mont du Pré. Raymond choisit en 1929 de quitter Morteau pour Besançon, où son oncle Joseph (1872-1943) est horloger rhabilleur "spécialiste de pièces compliquées, chronographes et répétitions, montres à quantième et à réveil", au 9 rue des Noyers (actuelle rue Krug) en 1939. Il est signalé en 1932 au 21 Glacis d'Arènes, sur un papier à en-tête précisant qu'il fabrique "chronographes - bracelets, compteurs : au 1/5e et 1/10e de seconde, au 1/100e de minute (industriels), à marche permanente, avec dédoublante rattrapante", puis en 1936 au 14 avenue Clemenceau où il produit "chronographes et compteurs pour les sciences, l'industrie et les sports, montres ancre 3 3/4 à 19 lignes".Trop à l'étroit et désireux de réorganiser son affaire, il achète au milieu des années 1930 à la société Douge un terrain de 3 500 m2 pour implanter une nouvelle usine destinée à accueillir une centaine de personnes. Il s'adresse en 1938 à l'architecte Pierre Noë (1899-1970), établi au 11 rue des Villas et auteur notamment en 1929-1930 de la villa Carrel au 1 bis rue Victor Delavelle (future Chambre départementale d'Agriculture du Doubs). Il lui demande une ébauche pour un bâtiment abritant à la fois une usine de montres et son appartement. Noë propose un édifice de 30,70 x 13 m associant un corps carré dédié à l'habitation, coiffé d'un toit en pavillon muni d'un clocheton, accolé à un corps rectangulaire accueillant l'usine, les deux communiquant à chaque étage. L'ensemble s'élève sur cinq niveaux : étage de soubassement avec logement du concierge et réfectoire, rez-de-chaussée surélevé avec salles à vivre et bureau, deux étages carrés avec chambres et ateliers et un étage en surcroît avec chambres de bonne, salle de jeux et archives. La dernière version de son projet est datée du 24 mai 1939.Très rapidement déçu de l'aspect trop traditionnel et régionaliste du projet, Raymond Dodane est mis en contact avec les frères Perret par son frère Claude, élève de Raoul Dufy, et ce dès 1938 (la façade porte l'inscription A.G. Perret / arch. 1938). En juin et juillet 1939, Auguste Perret livre une série de dessins que le retard dans l'obtention du permis de construire (lié à la fixation de l'alignement sur l'avenue de Montrapon) et les perturbations dues à la guerre permettent de faire évoluer. Le bâtiment doit avoir une ossature béton (système poteaux-poutres dégageant un plan libre), avec remplissage par des panneaux préfabriqués en béton de gravillons lavé, et un toit terrasse. Perret prévoit lui aussi cinq niveaux mais les distribue différemment avec, notamment, la conciergerie au soubassement, l'appartement au rez-de-chaussée surélevé, les bureaux au premier étage et l'atelier au deuxième, l'ensemble desservi par un escalier hors-oeuvre placé dans l'angle nord. Il dessine deux annexes au nord (garages et atelier), les aménagements du parc (terrasse rachetant le dénivelé du terrain, piscine, terrain de tennis, etc.), le mobilier et une partie des décors intérieurs. Pour sa part, Claude Dodane dessine le carton d'une tapisserie (le Temps, 1945), réalisée à Aubusson, et choisit les autres artistes intervenant : Albert Lenormand (1915-2013) pour la salle à manger (la Cène, 1947) et René Perrot (1912-1979) pour les chambres d'enfants (deux peintures sur toile inspirées des contes et légendes de Franche-Comté, 1944). La construction, qui s'achève en 1943, est surveillée par un architecte d'opération, André Boucton (1891-1977), auteur à Besançon en 1926 de l'immeuble dit le Building et architecte d'opération pour Paul Guadet dont il achève les chantiers des écoles nationales professionnelles d'Horlogerie à Besançon (1926-1932) et d'Optique à Morez (1928-1932). Une extension de l'usine (qui ne se réalisera pas) vers le sud-ouest est rapidement envisagée en prévision d'une implantation sur le marché américain, extension importante puisqu'elle devait se traduire par un passage de 7 à 25 travées en façade. L'usine Dodane fabrique des montres, notamment à partir des années 1950 des chronographes à destination de l'Armée de l’Air et de la Marine (types E 21 et E 23). Ainsi la SA Dodane produit-elle de 1954 à 1994, en utilisant des calibres suisses de la société Valjoux, environ 5 000 montres chronographes des types E 20 et E 21, sous différentes marques : Dodane mais aussi Airain, Airin, Chronofixe, Irame, Dod, Gab, voire sous la marque de certains clients ou sans aucune marque. Spécificité de la type E 21 (qui sera rééditée en série limitée en 2005) : elle dispose d'un mécanisme dit de "retour en vol" permettant, par un seul appui sur le bouton, l'arrêt et la remise à zéro instantanée du chronographe. La société fournit diverses administrations - l'Education nationale et les PTT par exemple - mais sa clientèle est essentiellement liée à l’aviation. Disposant des homologations nécessaires, elle vend notamment à l'armée de l'air française et à l'Otan, mais aussi aux compagnies aérienne civiles, françaises ou non. Elle produit 160 000 montres en 1978.En 1980, Michel (né en 1937) et Laurent (né en 1947) succèdent à leur père à la tête de l'entreprise (qui réalise 40 % de son chiffre d'affaires à l'export), le premier s'occupant des questions commerciales et le second de la partie administrative. Cette année, la société emploie 120 personnes et produit près de 150 000 pièces : montres à mouvement à ancre, montres électroniques à quartz, chronographes, compteurs (la collection Airin Dodane compte près de 600 modèles). 20 % de son activité est à destination des armées et compagnies aériennes civiles du monde entier : outre les chronographes de bord pour les avions militaires, elle réalise notamment des chronographes altimétriques ("permettant aux parachutistes le saut de nuit à ouverture retardée"), des chronographes au centième de seconde (utilisés pour synchroniser l'ouverture du cockpit et le déclenchement, avec un léger retard, du siège éjectable). Elle est choisie en 1983 pour produire le modèle 211 (hybride quartz-mécanique) intégré au tableau de bord d’hélicoptères (Tigre franco-allemand) et avions de chasse (Mirage 2000, Rafale, etc.).En 1986, l'usine est protégée au titre des Monuments historiques : elle est inscrite par l'arrêté du 20 juin 1986, avec son décor intérieur et le jardin. Elle accueille alors près de 80 personnes, qui produisent des montres à quartz haut de gamme commercialisée sous la marque Laurent Dodane et destinées essentiellement à l'Extrême-Orient (60 % de l'activité), des montres de moyenne gamme (20 %), et des chronographes et autres appareils à destination de l'aéronautique (20 %).La perte d'un gros marché militaire et les conséquences économiques de la guerre du Golfe (forte baisse de la demande) mettent l'entreprise en difficulté. Lorsqu'elle est placée en liquidation judiciaire le 28 septembre 1994, elle ne compte plus que 24 personnes. Elle ferme définitivement le 7 avril 1995 (Laurent Dodane et ses deux fils créeront en 2001 la société Anode, exploitant la marque Dodane 1857). Le parc, le court de tennis et la piscine sont achetés en 1996 par le promoteur Marignan Immobilier, auteur de l'immeuble voisin (appartements pour étudiants dit les Studiantes), qui les laisse à l'abandon. L'usine et ses annexes sont, elles, acquises en 1998 par Patrick Pelletier, promoteur immobilier, qui les transforme en bureaux pour sa société (Texo) et diverses administrations (direction régionale de l'ANPE et mutuelle des PTT).
Périodes de construction :
2e quart XXe siècle
Architecte ou maître d'oeuvre :
PERRET Auguste (architecte)
Propriété d'une société privée
Ouvert ou fermé à la visite, location de salle, chambres d'hôtes ?
Fiche Mérimée : PA00101613
Dernière mise à jour de la fiche Monumentum : 2024-09-16
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