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Adresse renseignée dans la base Mérimée :
place des Templiers
22260 Runan - France
Code Insee de la commune : 22269
Côtes d'Armor [22] - Saint Brieuc - Bretagne
Adresse approximative issue des coordonnées GPS (latitude et longitude) :
2 Rue de Kerilis 22260 Runan
Eléments protégés :
Eglise (cad. B 143, 142) : classement par arrêté du 19 décembre 1907 ; Clôture du cimetière : inscription par arrêté du 6 mars 1925 ; Calvaire sis à l'angle de l'ancien cimetière : classement par arrêté du 4 décembre 1951
Description :
Plan et ordonnance intérieure L´intérieur de l'église présente une nef bordée d'une suite ininterrompue de cinq arcades qui ne laisse pas percevoir l'existence des bras de transept. Cette nef se développe jusqu'à la maîtresse-vitre sur une longueur de 27 m et une largeur de 6 m et ne comporte aucun arc-diaphragme. La fausse voûte lambrissée actuelle, sans entraits apparents, appartient à la restauration de la fin du XIXe siècle – ce qu'affiche sans équivoque la sculpture des sablières – et il est quasiment certain que la charpente d'origine comportait à intervalles réguliers des entraits semblables à ceux qui subsistent dans le bras nord. La réfection de la fin du XIXe siècle n'a très certainement fait ici que reprendre une modification du début du XVIIIe visant à créer un volume ininterrompu lors de l'installation en 1728 d'un grand retable contre le chevet. A l´extérieur, l'important décrochage en hauteur du faîte du toit et son décalage par rapport à l'axe de la nef traduisent cette reprise de charpente.La campagne du XIVe siècle est caractérisée par des arcades à deux ressauts simplement chanfreinés présentes à l´entrée des bras de transept ainsi que sur toute la longueur du côté nord de la nef. Les piles qui leur correspondent, de plan carré et posées à l´oblique, sont cantonnées de quatre colonnettes moulurées que coiffent des chapiteaux assez fortement renflés. Les deux premières arcades du bas de la nef, du côté sud, correspondent à la reprise du chantier au début du XVe siècle : leur mouluration complexe, à multiples ressauts, de même que leurs piles à faisceaux de colonnettes, chapiteaux à feuillages et bases polygonales en flacon, appartiennent à une mouvance stylistique nouvelle.Les exceptionnelles piles à rinceaux de la chapelle de la commanderie n´ont pas d'équivalent connu en Bretagne : ce décor habituellement réservé aux ébrasements des portails matérialise à l'intérieur de l'église un espace alors fermé par une clôture probablement en bois, qui pouvait à l'occasion accueillir la famille ducale. Leurs tailloirs à mouluration complexe, leurs chapiteaux renflés formant comme un bourrelet ont un accent anglais très marqué. Les colonnettes d'angle y présentent sur leur face antérieure un réglet, caractéristique des années 1430-1450, que l'on retrouve à la même date par exemple dans la chapelle de Tronoën à Saint-Jean-Trolimon. La maîtresse-vitre occupe toute la largeur et la hauteur du vaisseau central. Ce chef-d´oeuvre du vitrail gothique breton a conservé dans ses parties basses et dans son réseau des armoiries : R. Couffon y a reconnu en particulier les armes d´alliance d´Henry du Parc, seigneur de La Roche-Jagu, et de Catherine de Kersaliou, et celles de Jean du Perrier et de sa seconde épouse, Constance Gaudin, qui lui permettent d'avancer la date de 1423. Son programme iconographique est celui d'une Crucifixion entourée par les figures des saints patrons de différents donateurs que leurs armoiries permettent d'identifier. Cette verrière dont le haut niveau de qualité est encore perceptible malgré les nombreux plombs de casse et les restaurations du XIXe siècle, était au XVe siècle associée à l´exceptionnel retable, alors polychrome, surmontant le maître-autel. Ce retable représentant de part et d'autre de la Crucifixion les épisodes majeurs de la vie de la Vierge depuis l'Annonciation jusqu'à son Couronnement fut attribué à tord par René Couffon aux ateliers de Tournai et daté de la même époque que la maîtresse vitre ; son analyse récente par Gildas Durand a permis d'y reconnaître une production bretonne en kersantite, datant plus probablement du XIVe siècle, fortement marquée par une mouvance stylistique anglaise. Quoi qu'il en soit, la richesse de l'ensemble devait conférer au sanctuaire de Runan, malgré la modestie de ses proportions, le raffinement et l'élégance d'un édifice de rang princier.La réfection du collatéral nord à la fin du XIXe siècle a respecté l´esthétique de l'édifice : les anciennes arcades de la nef ont été conservées, seuls des arcs-diaphragmes ont été lancés, et dans le mur gouttereau entièrement reconstruit, des fenêtres passantes ont été créées, permettant un meilleur éclairage de l´église.Ordonnance extérieure Malgré la réfection d´une partie de son parement et de ses baies hautes en 1822, le clocher-porche a conservé sa silhouette, son garde-corps à quadrilobes et sa flèche d´origine, caractéristique du Trégor. A sa base, deux portes très simples dont les arcs à ressauts chanfreinés viennent se fondre dans de larges ébrasements unis, semblables à celles des porches de La Roche-Derrien et de la chapelle de Kermaria an Isquit de Plouha, prolongent au tout début du XVe siècle une tradition stylistique du XIVe.L´observation du collage entre la chapelle sud-ouest et le porche sud établit que cette chapelle appartient bien au chantier de reconstruction du début du XVe, ce que tend à confirmer le style de sa large baie dont le dessin rappelle celui de la maîtresse-vitre. Son réseau dense souligné par un tore qui prolonge les colonnettes à chapiteaux renflés qui séparent les lancettes la distingue de toutes les autres baies de l'église. Les armoiries sculptées à gauche de la fenêtre, dans lesquelles se devine l'écartelé de la famille de Kernerc'hiou, et au-dessus de la baie carrée ouverte dans le décrochement qui précède le porche sud, celles du commandeur de Keramborgne présentées par deux lions, pourraient correspondre à celles qui sont mentionnées par le mandement ducal de 1439 et localiser ici « la chapelle commencée et faicte o près de faicte ».Le porche sud ainsi que la chapelle de la commanderie ont été édifiés en même temps, comme l'indique entre le pignon de la travée du porche et celui de la chapelle un pinacle d'origine posé sur un linteau échancré porté par deux corbelets élégamment moulurés qui laisse passer l'écoulement du chéneau. Dans le pignon de la travée du porche, une petite rose témoigne du souci d'éclairer le bas de la nef, sans doute alors peu ouvert du côté nord. Si l'on se réfère au mandement de 1439, le porche de Runan serait à peu près contemporain de celui de l'église de La Martyre qui a pu lui servir de modèle. On y retrouve la même apparition précoce des contreforts obliques qui représentent sans doute parmi les premiers exemples en Bretagne (leurs pinacles sont des réfections un peu sèches de la fin du XIXe siècle). La rencontre du voussoir extérieur avec des pinacles latéraux à arête vive en surplomb sur des culots sculptés, de même que les colonnettes de la porte intérieure qui semblent se fondre dans les voussures de son arc, appartiennent à un jeu de formes savant et constituent à cette date une véritable innovation. L'arrêt de l'intrados de l'arc d'entrée à la base de l'arc ainsi que les ogives de la voûte retombant sur des culots rappellent les porches de Guingamp.L'arc intérieur, le plus étroit, est simplement orné d'une frise de feuilles retournées, celui du milieu, plus large, accueille les douze apôtres, assis et le bras levé, et enfin l'arc externe, le cortège des anges qui escortent la Vierge. Sur le pignon, un bandeau composé à la manière d'un retable confronte les deux scènes extrêmes de la Vie de la Vierge, l'Annonciation, à droite, et la Vierge de Pitié, à gauche. Ce programme sera repris quelques années plus tard, vers 1445, sur le porche de la chapelle de la Clarté à Perros-Guirec. Au sommet du pignon, les armes ducales, un écu en bannière couronné, et de part et d'autre dans les contreforts, les armes du commandeur Pierre de Keramborgne supportées par des lions, indiquent dès l'entrée les deux principaux commanditaires du chantier, le duc et l'ordre des hospitaliers de Saint-Jean.On retrouve les armes ducales au sommet du pignon de la chapelle de la commanderie. Dans une niche bordée d'un phylactère que parcourent des hermines au naturel et sur lequel était sans doute peinte la devise « A ma vie », les armes de Jean V présentées par deux hermines, et identifiables par son cimier personnel, des cornes de boeuf encadrant le lion des Montfort, impliquent une construction antérieure à sa mort en 1442. En-dessous, dans un écu en bannière couronné, les armes supposées de Jean du Perrier, titulaire de la seigneurie du Perrier en Kermoroc´h, devenue châtellenie ducale en 1405 : ce qui expliquerait l'écu en bannière surmonté de la couronne ducale. La belle rosace ornant le réseau de la fenêtre intègre une étoile à six pointes, allusion à l'étoile de saint Jean-Baptiste qui rappelle celle présente au chevet de l'église de Saint-Jean-du-Doigt.Les réseaux à quadrilobes et les traverses de la fenêtre du bras sud (que l´on retrouve identique dans le bras nord), rappellent ceux des fenêtres du choeur de la cathédrale de Tréguier, élevé dans le dernier quart du XIVe siècle. A l´angle sud-est, le prolongement du contrefort qui supporte la crossette de pignon est un trait caractéristique de l´école de Guingamp, très probablement emprunté, de même que les traverses des baies, au milieu anglais.Le style du réseau de la maîtresse-vitre, résolument moderne si l'on accepte la datation de 1423 donnée par l´analyse du décor héraldique de la verrière, peut évidemment surprendre à une date où l´immense majorité des églises bretonnes, en particulier dans le Trégor, conserve un attachement marqué au gothique rayonnant. L´hypothèse de datation avancée par R. Couffon est entérinée par F. Gatouillat et M. Hérold dans leur récente publication des Vitraux de Bretagne qui rapproche, à une petite dizaine d´années près, le vitrail de Runan des verrières hautes du chœur de Quimper, datées de 1410-1415. En réalité, la confrontation du dessin de la verrière de Runan avec celui de certains édifices anglais édifiés au cours du XIVe siècle et appartenant au Decorated Style permet des rapprochements éclairants. Dans le Lincolnshire, la grande église rurale d´Heckington présente à son chevet une verrière datée de 1333, dont le réseau à base de courbes et de contre-courbes recroisées détermine de grandes accolades de part et d'autre d'une large mouchette médiane, disposition que l'on retrouve avec un réseau plus dense à Runan. Ces rapprochements stylistiques confortent l'analyse de R. Couffon et l´hypothèse d'une œuvre des environs de 1420, dont il faut souligner qu'elle représenterait à cette date l´une des toutes premières manifestations du style flamboyant en Bretagne.
Historique :
L'église est un édifice des 14e-XVe siècles conservé presque intact dans ses détails architecturaux. Un ossuaire de la Renaissance accolé au clocher. Dans le cimetière, présence d'un calvaire orné de statues dont le socle forme une chaire à prêcher extérieure. A la fin du XIXe siècle, les trois croix qui le surmontaient ont été déposées et remplacées par une croix en fonte qui s'est brisée au milieu du XXe siècle.
Le lieu de Runargan, en breton « la colline d'argent », serait le site d'un sanctuaire antique, à Belenos ou Toutatis, établi sur le passage de l'ancienne voie menant de Nantes à Coz Yaudet. Ce lieu est mentionné en 1182, dans une charte apocryphe, parmi les biens de l'ordre du Temple en Bretagne. La première chapelle, passée dès le XIIIe siècle aux hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, est rattachée à la commanderie du Palacret située en la paroisse de Saint-Laurent, près de Bégard. Elle est entièrement reconstruite à partir de la fin du XIVe siècle, probablement à l'initiative du duc Jean IV de Montfort soucieux de marquer sa suprématie sur la maison de Penthièvre à laquelle sa victoire dans la guerre de succession de Bretagne lui a permis de reprendre les places fortes de La Roche-Derrien, de Châteaulin-sur-Trieux et de Guingamp. A cette première reconstruction appartiennent les deux bras de transept, y compris les arcs ouvrant sur la croisée, ainsi que les arcades du côté nord de la nef.Dès le début du XVe siècle, les dons et les faveurs de la maison ducale affluent : les Lettres et mandements de Jean V font état de concession d'une première foire annuelle en 1414, puis d'une seconde en 1421, « pour augmentation de la ditte chapelle et du service divin en icelle », d'une autre foire annuelle et perpétuelle au jour et fête de saint Barnabé, dont le duc confie la garde et la police au seigneur du château proche de La Roche-Jagu, enfin en 1436, d'une quatrième foire le samedi précédant le pardon. Les travaux auraient commencé par le chevet, reconstruit vers 1420 : R. Couffon établit cette datation à partir de l'analyse des armoiries présentes dans la maîtresse-vitre. En même temps que le chœur, on construit, à l'extrémité ouest de la nef, un clocher porche et l'on entreprend la reconstruction du collatéral sud.Une enquête demandée par le duc en 1439 suite à la plainte du commandeur Pierre de Keramborgne d´avoir vu ses armes, apposées sur la chapelle sud, détruites par deux frères de la famille de Kernech´riou, seigneurs de Lestrézec en Ploezal, fait état de ces importants travaux commencés depuis peu. Ce texte, l´un des premiers en Bretagne à décrire une oeuvre architecturale, mérite d´être cité au moins partiellement : « que en celle chapelle et église de Runazhan, devers le midi, a esté puis naguère une chapelle commencée et faicte o près de faicte, et que au pingnon d´icelle nouvelle chapelle, devers ledit midi, est assise et levée une belle fenêtre de pierre de taille, et que en une belle pierre de taille assise en hault d´un côté d´icelle fenêtre, par dehors devers midy, ledit exposant avait faict mettre et entailler un écusson où estoient mises et entaillées les armes d´icellui exposant avec son timbre au-dessus d´icelles armes, semblans en figure que celx deux leons tenoient ledit escuçon où estoient celles armes ».Il faut enfin rattacher à la campagne de reconstruction du XVe siècle, l'édification à l'angle sud-ouest de l'enclos d'un calvaire dont la partie inférieure, une cuve octogonale fermée par une porte, servait de chaire extérieure. Ce dernier était associé à un portail qui fermait l'enclos.Fondation des ducs Jean IV et Jean V et des familles de Trogoff, Plusquellec et Traoumenez ; édifice XIVe siècle ; sauf chevet de 1421 à 1423 ; porche et chapelle sud de 1435 à 1438 ; ossuaire en 1552 ; bas de la tour début XVe siècle, partie supérieure remontée en 1822. Collatéral nord reconstruit en 1895, sacristie édifiée à la même époque contre le mur sud du chœur, charpente lambrissée de la nef refaite.
Périodes de construction :
XIVe siècle, XVe siècle
Propriété de la commune
Ouvert ou fermé à la visite, location de salle, chambres d'hôtes ?
Fiche Mérimée : PA00089576
Verrière : saint Pierre, Vierge (la), Christ en croix, saint Jean, sainte Catherine, sainte Hélène
Fonts baptismaux
Retable : la Crucifixion, l'Adoration des Mages, la Mise au tombeau, le Couronnement de la Vierge
2 dalles funéraires
Coffret aux saintes huiles
Calice, patène
Croix (crucifix) : Christ en croix
Chaire à prêcher
Dernière mise à jour de la fiche Monumentum : 2024-09-20
Consultez le programme des Journées du Patrimoine pour le Monument Historique Eglise Notre-Dame et cimetière situé à Runan en consultant le programme officiel des JEP 2024.