Médiathèque Grand-Plage, ancien centre culturel Le Forum à Roubaix

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Label Architecture Contemporaine RemarquableLabel Architecture Contemporaine Remarquable

Adresse renseignée dans la base Mérimée :
Pierre-Motte (rue) 2
59100 Roubaix - France

Code Insee de la commune : 59512
Nord [59] - Lille - Nord Pas de Calais (Hauts-de-France)

Adresse approximative issue des coordonnées GPS (latitude et longitude) :
21 Grand Place 59100 Roubaix

Description :
Mitoyenne de l’hôtel des Postes mis en service en 1977, la médiathèque de Roubaix forme un quadrilatère aux façades linéaires. Son voisinage immédiat détermine en grande partie la morphologie de l’édifice, dont seule la façade principale (façade nord) et celle en retour, donnant sur la rue du Château (façade ouest) communiquent directement avec la voirie. Les corps de bâtiment oriental et méridional sont soumis à l’emprise du bâtiment administratif : la façade orientale touche en grande partie l’hôtel des Postes, tandis que la façade sud regarde le parking des employés. Entouré par les rues du Château, de la Halle, de la Sagesse et la rue Pierre-Motte, la médiathèque prend place à proximité immédiate de l’hôtel de ville et de sa Grand’Place, traversée au nord par la Grande-Rue. Cette position centrale lui offrant le privilège de la visibilité et de l’accessibilité : celle-ci est renforcée par l’aménagement en coude de la rue Pierre-Motte, dont la largeur évoque une place, directement reliée à celle du bâtiment édilitaire. Malgré les servitudes qu’elle impose à la médiathèque – habilement déjouées par la maîtrise d’œuvre – la présence de l’hôtel des Postes génère un afflux de public, contribuant à faire de la rue Pierre-Motte un lieu de passage, voire de rencontre. En outre, avec la présence des Archives nationales du monde du travail et du musée de la Piscine, la médiathèque bénéficie aujourd’hui du rayonnement d’autres établissements culturels. D’une emprise de plus de 1 600 m² au sol et élevé sur quatre niveaux, l’ancien Forum de Roubaix dresse de façon imposante ses façades, linéaires et sans ressauts, de 14 mètres de haut. De l’extérieur, le bâtiment couvert en terrasse offre l’aspect d’un cube en partie hermétique où s’opère, dans le sens horaire, une gradation de l’opacité vers la transparence. A la façade orientale, aveugle en raison de sa mitoyenneté avec le bâtiment des Postes, succède la façade méridionale, plus translucide grâce à la présence de pavés de verre à toutes les ouvertures. Davantage ouverte, la façade ouest présente un équilibre parfait entre transparence et opacité, avec sa stricte alternance entre baies et parois sans ouverture. La façade principale, la plus visible, bénéficie du recul qu’offre la rue Pierre-Motte, qu’atténuent aujourd’hui les nombreux arbres plantés sur le parking ; elle reçoit de ce fait le traitement le plus soigné. Toutes les façades ont cependant en commun leurs matériaux dominants, à effet bichrome, dont le choix tranche avec la brique traditionnellement utilisée dans la construction des villes du nord, très présente à Roubaix. Partout où les baies et ouvertures structurées par des menuiseries en aluminium anodisé d’un ton bronze foncé n’agrémentent pas les élévations, domine la pierre d’Hauteville. Cette roche calcaire blanche légèrement ambrée et d’un grain très fin s’apparentant au marbre et proche du travertin employé à l’hôtel des Postes, est plaquée de façon systématique en panneaux de différentes formes et selon différentes combinaisons en fonction des élévations. Leur application à joints fins accentue l’aspect lisse des murs. Cet habillage dissimule l’ossature à voiles en béton armé coulés en œuvre. Le traitement différencié des façades annonce, depuis l’extérieur, et plus particulièrement au rez-de-chaussée, l’organisation hiérarchique et raisonnée de l’aménagement intérieur, comme l’explique l’architecte responsable du projet : « la façade principale formant le fond d’un grand espace urbain a été réservée, sur ses quatre niveaux, aux services publics de la bibliothèque ; la façade secondaire établie en bordure de la rue du Château a été réservée […] à la majeure partie des services intérieurs et annexes ». Placée dans le prolongement de la façade de la poste dont elle reprend en partie l’aspect général, mais en saillie par rapport à elle, la façade principale introduit le visiteur aux espaces intérieurs grâce à une série de procédés visuels. Des travées verticales formant des séquences irrégulières, évoquant des codes-barres, marquent les niveaux extrêmes (rez-de-chaussée et dernier étage) de l’élévation. Les premier et deuxième étages sont matérialisés, au contraire, par un grand encadrement en pierre, formant deux registres horizontaux. Cette composition, où l’entrée figure de façon excentrée, à droite, concerne les deux tiers gauches de l’élévation ; formée d’une verrière, l’entrée est accostée par deux pans de mur en avancée. À droite de celle-ci, un haut et grand mur entièrement aveugle, habillé de panneaux carrés en pierre d’Hauteville que sur les autres élévations, clôt la composition en laissant toute la place à la signalétique (celle d’aujourd’hui, en lettres métalliques rapportées, n’est pas d’origine). Côté rue du Château, la totalité de l’élévation reprend le schéma des niveaux 0 et 3 de la façade principale, à la manière de code-barres : les baies étroites et superposées de chaque étage sont séparées les unes des autres par des pans de mur – plaqués de pierre – de diverses largeurs. Seuls la partie réservée à l’entrée du personnel et un accès de service caractérisés par un traitement en béton banché viennent rompre cette scansion à la fois systématique et dynamique. Plus lisse, car dépourvue du moindre ressaut, la façade sur la cour des Postes fait alterner panneaux de pierre et pavés de verre, fermant ainsi la composition des trois élévations donnant sur le domaine public. « Compte tenu du terrain et du volume construit qu’il était possible d’y implanter, l’organisation fonctionnelle de la bibliothèque fut étudiée en accord étroit avec les représentants de l’administration municipale et avec la Direction des bibliothèques et de la lecture publique ». Dans son mémoire rédigé en mai 1975, l’architecte L.-G. Noviant expose les contraintes programmatiques et techniques ayant présidé aux différents choix opérés. En raison de la présence d’une nappe d’eau, le bâtiment conçu sur quatre niveaux (oscillant chacun entre 1 330 et 1 380 m² de superficie) est dépourvu de sous-sol et repose sur des pieux de près de 12 mètres de profondeur. Cette contrainte explique en partie l’installation des locaux techniques au rez-de-chaussée et des magasins au dernier étage (aile sud). Une autre contrainte – la mitoyenneté avec les postes voisines imposant un corps de bâtiment aveugle sur son versant extérieur – donne lieu à l’un des points forts du programme. La création d’un patio central, permettant d’optimiser l’éclairage naturel des locaux, offre l’occasion de créer un aménagement conçu comme une place de ville, nappée de lattes, pavés, de galets et de gravillons disposés en bandes de hauteurs différentes et agrémentée de bacs. Cet aménagement est aujourd’hui couvert par le bois de la terrasse réalisée en 2015, rendant le patio accessible aux visiteurs. Aménagés dans ce quadrilatère à vide central sur quatre niveaux, les espaces intérieurs se démarquent avant tout par leur fonctionnalité. Malgré l’absence de sous-sol, la disposition des locaux techniques et des magasins dans des corps de bâtiment considérés comme secondaires, permet à l’origine de dégager, pour les lecteurs, de grands espaces de consultation. Si le rez-de-chaussée est en partie occupé, à l’époque de la construction, par un logement de fonction (sur la rue du Château), ne laissant au public que l’aile principale et le corps en retour d’équerre du côté des Postes, c’est pour rendre disponible un maximum de place dans les étages où, hormis dans le bâtiment donnant sur la rue du Château, toutes les ailes sont dédiées à l’accueil des publics. Le dernier étage, avec ses magasins au sud et l’ancien logement de fonction du conservateur à l’ouest, faisant à l’origine exception. A tous les niveaux sont, en outre, aménagés des sanitaires publics ou destinés au personnel dont les bureaux occupent l’aile du Château. Fonctionnelle, l’organisation des services en différentes séquences a récemment connu une évolution majeure, avec l’ouverture au public de nouveaux espaces de consultation et d’activités diverses, suite à la suppression des logements de fonction dans le bâtiment occidental. Au troisième étage, en lieu et place du logement, un ensemble de salles d’activités (dont une salle multimédia) a ainsi pu être créé, renforçant l’impression d’ouverture, de transparence et de fluidité qui fondent la qualité programmatique et esthétique de la médiathèque de Roubaix où, d’une manière générale, ne sont cloisonnés que les locaux remplissant des fonctions techniques et administratives. L’accent y est, en outre, principalement mis sur la circulation horizontale. Les trois escaliers, dont celui destiné au public situé dans l’angle formé par les rues du Château et Pierre-Motte, sont rejetés sur les côtés de la composition et disposés dans des cages fermées, demeurant ainsi invisibles depuis les autres espaces. Ils reçoivent pourtant un traitement graphique particulièrement soigné, avec leurs murs d’échiffres dessinés dans la continuité des marches recourbées, dont les larges et hautes rampes en bois mettent en valeur la structure en béton gravillonné. La vue sur les élévations intérieures, plus ordinaires et semblables à des façades d’immeubles de bureaux avec la trame orthogonale que dessinent leurs baies soulignées par le parement de pierre, permet de rendre compte au visiteur de l’étendue verticale du lieu qu’il occupe.

Historique :
Dans la première moitié du XXe siècle et à l’instar de nombreuses villes du Nord, Roubaix concentre une grande partie des activités industrielles nationales – notamment dans le domaine du textile. De cette période à la fois industrieuse et faste, la capitale de la vente par correspondance (présence des sites de production de La Redoute, des 3 Suisses) hérite, à l’issue des Trente Glorieuses, d’un tissu urbain particulier, caractérisé par la rapidité de son développement : peu rationnel, enclavé et dominé par un habitat insalubre, il est en grande partie marqué par la physionomie de ses « courées » (formées de petites maisons jointives, peu denses mais mal aérées et souvent anciennes). Ce même passé industriel est aussi à l’origine d’un patrimoine architectural riche et varié. Ville d’art et d’histoire depuis 2001, Roubaix regroupe un grand nombre d’édifices prestigieux bénéficiant aujourd’hui, pour la plupart d’entre eux, d’une protection au titre des Monuments historiques : ses églises, anciens hôtels (comme l’hôtel Prouvost, bâti en 1878), ou encore son hôtel de ville conçu par Victor Laloux (dont le fronton représente les différents métiers exercés dans la ville au XIXe siècle) côtoient d’anciennes usines, sur lesquelles s’appuie en partie le dynamisme actuel de Roubaix, notamment dans le domaine culturel : des Archives nationales du monde du travail installées dans l’ancienne filature de coton et de laine Motte Bossut et Cie, à l’établissement public « La Condition publique » établi dans un ancien bâtiment de conditionnement de la laine, ces reconversions assument une démarche où le nouveau tire massivement parti de l’ancien. La transformation de l’ancienne piscine en Musée d’art et d’industrie en est un exemple internationalement connu. Elaboré à partir de 1972, le programme de la construction d’une nouvelle bibliothèque municipale à Roubaix prend forme au moment où la ville est en proie à une sérieuse crise économique. Consécutive à la désindustrialisation progressive de toute la région, elle entraîne de nombreux déséquilibres sociaux et une paupérisation préoccupante, qui se traduisent notamment par l’enclavement et la dégradation de ses quartiers. Malgré la mise en place, en 1963, d’un plan d’urbanisme directeur pour la ville et l’agglomération, le centre-ville longtemps délaissé souffre de son isolement d’avec les autres quartiers – eux-mêmes imperméables à leur voisinage immédiat – ainsi que du manque d’une identité forte, malgré la présence de l’hôtel de ville. Cependant, avec notamment la mise en voie piétonnière de certaines rues (Vieil – Abreuvoir, ainsi qu’une partie de la Grande-Rue), et avec le chantier de la médiathèque comme projet fédérateur, les années 1970 marquent un tournant dans la prise en compte de l’urbanisme et de la construction comme vecteurs d’une dynamique positive. Ces années voient le remodelage de cette partie du centre-ville consécutivement à la destruction en 1952 des halles du XIXe siècle (elles-mêmes bâties en 1881 sur l’emplacement de l’ancien château) et avec l’implantation du centre commercial Roubaix 2000. Ce remodelage s’accompagne en outre du désenclavement concomitant des centres de Roubaix et Tourcoing grâce au percement de l’avenue des Nations-Unies, dite la « voie des centres ». Destinée à remplacer l’ancienne bibliothèque de la Grand’Place – jugée trop petite et peu adaptée à l’évolution du rapport des publics à la lecture et aux médias émergeants – la future médiathèque est envisagée dans la foulée d’un autre projet : la construction d’un nouvel hôtel des Postes. Celui-ci, dont les travaux commencent en 1975, détermine l’emplacement et, en partie, l’aspect de la future médiathèque. Définis par la convention signée lors du conseil municipal du 25 juin 1973, les contours du programme de la médiathèque sont approuvés par le ministère de l’Education nationale en décembre, permettant l’ébauche d’un avant-projet par l’architecte mandataire Louis-Georges Noviant et son associé Jean Dumont, tous deux architectes en chef des Bâtiments civils et Palais nationaux. Matérialisées par les plans dressés en avril (esquisse) puis juin 1974 (avant-projet) et en décembre 1975 (projet), les réflexions sur le programme font plusieurs va-et-vient entre la maîtrise d’œuvre et la municipalité, assistée des responsables de la bibliothèque. Les grandes lignes, résumées dans le mémoire que l’architecte produit en mai 1975, en sont jetées assez rapidement et validées par le conseil dans la foulée, si bien que le 22 octobre 1975, un arrêté préfectoral délivre à la commune le permis de construire du nouveau centre culturel. Pour des raisons inconnues, les travaux ne sont pas encore entamés au 17 septembre 1976. Au terme de près de trois ans de chantier, le maire Pierre Prouvost, dont l’élection à la suite de Victor Provo coïncide avec le début du chantier, inaugure Le Forum le 18 mai 1979, en présence de Jean-Claude Groshens, directeur du Livre au sein du ministère de la Culture. L’édifice est rapidement surnommé « le petit Beaubourg roubaisien » par analogie avec le grand établissement culturel parisien ouvert deux ans plus tôt. C’est alors la première bibliothèque de prêt du département et l’une des plus importantes de France. La presse de l’époque en énumère les caractéristiques, insistant sur son aspect « centre culturel » : pluridisciplinaire, le bâtiment accueille en effet un atelier de reliure, un service d’écoute et de prêt de disques et d’enregistrement, ainsi qu’une salle polyvalente destinée à l’organisation de conférences et de petits spectacles. Lors de son ouverture, elle accueille une exposition de 156 gravures de Picasso. La bibliothèque municipale de Roubaix fait l’objet en 2015 d’une importante campagne de rénovation de ses espaces intérieurs menée sous la direction de Stéphanie Legrand. Le remodelage complet du rez-de-chaussée, consistant en la multiplication des espaces accessibles au public (par le déplacement des locaux techniques et la suppression du logement de fonction), l’installation d’un café et surtout, l’ouverture du patio central, n’a pas affecté l’esprit général du lieu, qui se présente comme une grande boîte mêlant le caractère intime de sa structure opaque et l’ouverture de ses parois transparentes, ni les services qu’il abrite. C’est à l’issue de cette réhabilitation que la bibliothèque est rebaptisée « médiathèque Grand-Plage » – clin d’œil à la Grand’Place de l’hôtel de ville tout proche.

Architecte ou maître d'oeuvre :
Noviant Louis-George (architecte), Dumont Jean (architecte)

Datation de l'édifice :
1979

Année d'obtention du label Architecture Contemporaine Remarquable :
2023

Fiche Mérimée : ACR0001849

Dernière mise à jour de la fiche Monumentum : 2025-01-09

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